Dezzig dans Graphisme magazine

Interview Zig de Dezzig dans Graphisme magazine

Dezzig est dans le magazine Graphisme : 4 pages d’interview dans le hors-série Graphisme Vol 3 (Book of creation). C’est donc la première parution dans la presse papier pour Dezzig, ça fait plaisir ! Merci à Jeanne de m’avoir contacté. Voici l’interview dans son intégralité.

 

Interview Zig de Dezzig dans Graphisme magazine

Stéphane Constant vous êtes designer graphiste sous le nom de Zig, quand avez-vous pris ce surnom ?

 

Zig (cela vient des zigouis que je faisais à la pointe sèche sur mes peintures), c’est le surnom que m’a donné un ami graphiste il y a quelques années. Et puis c’est amusant : je dois être un bon zig, un sacré zig !

 

Quel est votre parcours, d’où vient votre formation ?

 

J’ai un parcours assez atypique puisque je n’ai fait aucune formation de graphisme : en pur self-made man ! J’ai toujours été entouré d’ordinateurs depuis mes 8 ans… C’est donc uniquement par facilité que j’ai choisi à 19 ans d’étudier l’informatique : une grosse erreur… Car ce qui me plaisait, c’était avant tout de créer de la musique, faire des photos, d’écrire. Il a fallu faire un choix ! Heureusement le métier de designer graphiste m’a permis de tout faire en même temps (et d’apprendre à dessiner). Je suis originaire d’Angoulême, j’ai travaillé un peu à Paris, quelques années à La Rochelle et puis maintenant à Saint-Brieuc où je vis avec ma petite famille. Ça fait maintenant plus de 15 ans que j’exerce ce métier. J’ai également exposé à plusieurs reprises mes dessins et peintures.

 

Vous êtes le fondateur de la jeune maison d’édition Dezzig, que vous définissez plus exactement comme une maison d’édition d’art graphique. Quelles-sont les valeurs portées par votre entreprise ?

 

Dezzig c’est du plaisir ! Cela consiste à suivre mes coups de cœurs, mes envies, mais de façon très sérieuse : en proposant une rémunération qui respecte vraiment le travail des graphistes. J’ai toujours été passionné par les grands affichistes comme Saul Bass ou Cassandre. Alors j’ai eu envie de faire partager ça : le goût de la simplicité dans l’illustration, le travail typographique au service d’une idée amusante ou d’un jeu visuel. Avec pour ambition d’essayer de rendre l’art graphique attrayant accessible à tous : un sacré défi ! Mais le véritable enjeu, c’est de n’utiliser que des techniques d’impression artisanales comme la sérigraphie ou la presse typo (pour mes cartes) et proposer quelque chose de radicalement différent. On trouve mes affiches en édition limitée parce que la sérigraphie d’art sur grand format coûte aujourd’hui plus cher qu’aucune autre technique d’impression. Je m’engage donc financièrement dans une production, c’est un gros risque, ce n’est pas comme un système d’impression numérique à la demande dans lequel il est facile d’imprimer n’importe quoi.

 

Pourquoi était-il important selon vous d’ancrer votre travail de graphisme autour de ces critères ?

 

D’abord par rapport à mon métier de graphiste (son aspect commercial, sa futilité, la compétition d’idées), il était nécessaire de se donner un peu d’air et voir autre chose. Il fallait que je travaille autrement en associant design graphique et travail artisanal pour revenir à l’essentiel : retrouver le sens du travail artistique, le plaisir de l’objet d’art. C’est pour ça que j’ai créé Dezzig en tournant le dos au “tout numérique”.

 

Pourquoi privilégier la sérigraphie comme mode de diffusion de vos travaux et collaborations ?

 

Il y a 5 ans je ne connaissais encore rien à la sérigraphie. Le déclic est venu avec l’exposition d’affiches sérigraphiées Earthquakes & aftershocks aux Beaux Arts de Rennes. Là je me suis pris une claque ! Je suis littéralement tombé amoureux de la sérigraphie pratiquée par les graphistes West coast américains. Leurs affiches proposent un style d’illustration et une liberté de composition typographique qui m’ont bluffé. Même si la pratique de la sérigraphie est contraignante, elle est particulièrement adapté aux illustrations en aplat de couleurs et elle permet un rendu sans équivalent sur de beaux papiers : épaisseurs d’encrage, transparences des encres, rendu des couleurs. C’était ça ou rien ! Pourtant c’est un gros travail, il n’y pas de machine automatique pour tout faire en appuyant sur un bouton ! Ici tout est manuel. Mais le rendu final en vaut la peine ! On peut sentir sous les doigts les reliefs laissés par l’encre sur le papier, c’est magique !

Interview Zig de Dezzig dans Graphisme magazine

Quel est le projet artistique de Dezzig ? Quelles sont vos inspirations ?

 

Le projet de Dezzig est simple : éditer le travail des graphistes en utilisant des techniques d’impression traditionnelle. J’ai toujours aimé les ateliers, le papier, la gravure, la lithographie et surtout… les livres. Je voulais donc créer un atelier et devenir à mon tour un artisan, c’est presque chose faite. Ma passion pour le vintage et le design des années 50 m’ont guidé dans mes choix artistiques. Mais ce qui me tenait à cœur c’est créer de l’art graphique en m’inspirant des grands affichistes, c’est pour ça que j’utilise le terme de sérigraphisme pour les affiches éditées par Dezzig, car il s’agit de graphisme adapté à l’impression sérigraphique (le nombre limité de couleurs impose un style parfois minimaliste).

 

Il y a actuellement un vrai renouveau du graphisme et la sérigraphie, et la mode des « rocks poster » en édition limitée y est pour beaucoup, il n’y qu’à faire un tour sur le site gigposters.com pour s’en rendre compte. c’est une source d’inspiration inépuisable ! Mes influences sont multiples. Elles vont de Saul Bass (mon maître absolu) à Jason Munn en passant par Paula Scher et Jon Sueda, essentiellement des graphistes américains. J’aime leur univers fait de simplicité et de poésie. Je suis aussi un grand fan des affiches sérigraphiées de Aesthetics Apparatus, DKNG et Shepard Fairey (Obey). C’est sûr, je ne suis pas un graphiste street-art, ce qui me plaît ce sont les veilles affiches « réclame » des années 50, leur aspect désuet et le travail typographique. Donc je collectionne beaucoup les vieux bouquins, les manuels d’imprimerie, les journaux et revues des années 30 et toutes sortes d’objets.

 

A l’occasion de la sortie début septembre d’un nouvel album du groupe 49 swimming pools, vous proposez sur votre site une affiche en collaboration avec le graphiste Pascal Blua. Comment est née cette collaboration ?

 

J’ai rencontré virtuellement Pascal via son blog www.stereographics.fr, un des rares site qui parle du graphisme dans la musique. On a donc d’abord discuté de pochettes de disque et d’un projet d’article que je voulais écrire sur le sujet. C’est en découvrant que j’étais éditeur, que Pascal m’a plus tard proposé son visuel des 49 Swimming Pools, je l’ai trouvé tout de suite très réussi. On a alors discuté longuement du choix de papier, des couleurs : un bel échange qui l’a incité à faire le trajet de Paris vers la Bretagne pour assister lui-même à l’impression de son affiche !

Décrivez-nous la naissance d’une affiche d’art, de l’idée du graphisme à la sortie de presse.

 

Je crois qu’il n’y a pas de règle, certains de mes visuels sont remaniés plusieurs fois pour atteindre leur aspect final. J’ai besoin des mots pour créer : ce fut le cas pour l’affiche Grand Théâtre qui évoque le théâtre de la ville de Lorient. C’est en travaillant sur cette idée de « grand » que j’ai trouvé l’idée toute simple de transformer un chandelier en ancre… puis ce jeu avec le ciel inversé. La composition est souvent faite sur papier, même succinctement et certains éléments (les nuages par exemples) sont dessinés au crayon puis scannés. Pour ma nouvelle affiche qui sera imprimée en décembre, j’ai même utilisé des taches d’encres ! J’aime bien aussi créer un lien entre les typographies et l’illustration, celles-ci sont souvent dessinée lettre par lettre comme pour l’affiche Easy Blablabla. Je redessine tout en vectoriel à l’aide du logiciel Illustrator. Une fois le visuel terminé, il reste à définir le nombre de couleurs pantone (le moins possible de préférence pour minimiser le coût d’impression) puis procéder à la séparation des couleurs : un vrai casse-tête ! (il faut “penser sérigraphie” au moment de la création de l’affiche). Ensuite je travaille une journée complète avec mon sérigraphe pour valider les teintes (les couleurs sont mélangées à la petite cuillère !) et imprimer ensemble la série complète de 100 ex.

 

Où faites-vous imprimer vos affiches ? Quel lien entretenez-vous avec votre imprimeur ?

 

La sérigraphie d’art est rare en France, et surtout je voulais rester en Bretagne, faire de l’artisanat local. En attendant de créer mon propre atelier, mes affiches étaient imprimées dans le Morbihan avec l’aide d’Hubert : un très bon sérigraphe d’art qui possède une fibre artistique. C’est un vrai partenariat, on échange beaucoup, on teste différents papiers en associant des encres mattes et brillantes. Il a toujours de bonnes idées à expérimenter et il m’a évité bien des ratages. Quand on a bien travaillé et que la dernière feuille est passée (soit 700 passages à la main rien que pour la dernière affiche 49 swimming pools, je peux dire qu’on est très fier !

 

Vous récidivez en musique, puisqu’en juin dernier vous aviez déjà créé une affiche pour Philippe Katerine inspiré de sa chanson Bla Bla Bla. Comment est né ce projet ?

 

L’affiche Easy Blablabla est venue d’une série d’illustrations pour enfants que j’avais réalisée et qui n’a finalement pas aboutie. Mais l’idée des ces bouches à gros yeux me plaisait. Il manquait un thème, une idée… et justement un jeu de mot pour lancer le projet. C’est la chanson « Bla bla bla » de Philippe Katerine qui me l’a apporté. Au départ c’était juste pour me faire plaisir, je n’envisageait même pas d’imprimer ce travail. J’ai mélangé l’univers de Katerine, son titre « Des bisous », son humour complètement décalé et son coté Easy listening (d’où le titre de l’affiche). J’ai finalement créé ce motif de bouches qui semblent dire « tu parles !» un peu inspiré des roses d’Alice au pays des merveilles. On y trouve même un hommage à Tim Burton (la chauve-souris de Batman) !

J’ai eu un vrai coup de cœur pour ce visuel, c’était drôle, il fallait que je l’imprime. Mais je voulais la cerise sur le gâteau : la signature de Katerine ! En janvier 2011, j’ai contacté son agent en lui soumettant mon projet d’affiche À la fois ironique et décalée, l’affiche pouvait être mal interprétée… Et pourtant un mois plus tard, je recevais l’accord de l’intéressé sans exigence particulière. Bingo il ne restait plus qu’à imprimer ! Si Easy blablabla est une affiche qui se moque gentiment de sa chanson, c’est pour moi le meilleur hommage à rendre à cet artiste complètement décalé. J’ai été invité quelques mois plus tard par les organisateurs du festival Au Pont du Rock (Malestroit) pour rencontrer Philippe Katerine, il m”a dit « merci, j’aime beaucoup ».

 

Vous vous battez pour une réelle qualité d’impression et un design print d’art, que pensez-vous du développement du design digital ?

 

On peut considérer que je fais de l’art numérique parce que mes visuels sont réalisés sur ordinateur. Mais pour moi, c’est tout naturel, le logiciel remplace avantageusement la planche à dessin surtout quand il s’agit de créer du graphisme, des affiches utilisant la typographie, un domaine encore associé aux métiers de l’imprimerie.

Quelque soit la technique utilisée : 3D, digital painting, finalement ce qui fait la valeur artististique, c’est comment l’œuvre est imprimée. Des éditeurs comme AE-éditions proposant exclusivement de la digigraphie sont peu nombreux, pourtant c’est l’un des rares procédé d’impression numérique qui puisse donner de la valeur à l’œuvre sur le papier. Même si on est loin de la sérigraphie, de la lithographie, de la presse-typo, la plupart de ces visuels ne pourraient pas être imprimées de manière artisanale.

 

Quels-sont les projets de Dezzig pour 2012 ?

 

En ce moment même, mon atelier est en construction ! Je vais enfin avoir de la place pour stocker et installer mon matériel de sérigraphie et peut-être de presse-typo. Je voudrais devenir un artisan à part entière et me consacrer à 100% à l’impression et à la création. Ensuite en ce qui concerne le design d’objets, j’ai d’autres projets en cours, notamment un nouveau support mural haut de gamme : le Poster-pant. La prochaine nouveauté sera ma collection de carnets avec couverture sérigraphiée et un petit coffret cadeau pour Noël. Pas de quoi m’ennuyer ! Mais le plus gros défis c’est de trouver mon public sans être élitiste.

 

 

Questions de Jeanne Albinet pour Graphisme magazine / Advanced Creation / Oracom

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4 Dezzig dans Graphisme magazine

  • nat

    Pas très cool de dire publiquement “si vous voulez lire l’article sans débourser 14,50€” ! Faut aussi penser au magazine qui a pris du temps pour faire un article sur toi !
    Si tout le monde fait ça, autant arrêter la presse papier…

    Répondre
  • Zig

    En effet, c’était maladroit. Je suis d’accord.
    Même si je remercie énormément le magazine d’avoir diffusé mon travail, ils ont fait un simple exercice de mise en page. J’ai écrit l’intégralité de l’interview (sauf les questions, c’est vrai).

    Comme le magazine est faiblement diffusé, j’avais aussi envie que les lecteurs de mon blog en profitent.

    Répondre

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